dimanche 28 novembre 2010

Vendel: Critique de son oeuvre "Dans le jardin du Presbytère"

N° 133 (Voir les pages : 8-9-17-34- 65à67 - 86à91 - 118à122 )
Dans la "Revue des Lectures" n°12 de la XIIe année du 15 décembre 1924, j'ai lu cette critique:
"Supposez que nos libelles et nos journaux soient assurés de ne pas franchir les frontières, et restent inaccessibles aux étrangers mêmes campés sur notre territoire. Comme nous serions plus excusables, alors, d'étaler nos tares nationales, d'insister sur nos défauts, de rappeler nos excès, d'instituer à l'air libre notre propre procès !
Il y a, d'une manière analogue, une première réserve à faire contre des livres du genre de celui de M. H. Nadel
(Henri Vendel signait souvent ses écrits de ce nom) "Dans le jardin du presbytère". En parlant un peu grassement, un peu vulgairement, de nos prêtres, en grossissant leurs défauts physiques, leurs petites tares morales, M. Nadel est-il bien sûr de n'être lu que par de bons et indéfectibles catholiques? S'il en était ainsi, il n'y aurait que demi-mal.
Nous savons tous que nos prêtres sont des hommes faillibles et pécheurs, que leur attitude physique peut, tout comme celle de l'un ou l'autre d'entre nous, prêter à rire.
Mais vous qui retournez aux fabliaux du moyen-âge, n'oubliez pas que nous ne sommes plus au moyen âge.
Non seulement "les oreilles ennemies nous écoutent", prêtes à exploiter ce que nous dirons de nos prêtres, à l'interpréter au tragique, à l'exagérer, à s'en faire une arme. Mais dans la lutte de chaque jour contre l'irréligion et l'immoralité, il y a lieu de nous rappeler que les prêtres sont nos chefs dûment qualifiés, revêtus d'un caractère sacré, et que nous ne devons pas livrer nos chefs aux quolibets de l'ennemi.
A cette première réserve, il convient d'en ajouter une seconde. Quoi que l'on puisse dire ou penser des ministres de la religion, il importe de ne pas éclabousser des railleries dirigées à leur égard, Dieu lui-même et la religion elle-même.
Dans certaines provinces de notre pays, pour ne parler que de la France, celles du nord et de l'ouest manceau ou bas-normand, de vieilles traditions de nature un peu janséniste et rigoriste évoquent un Dieu assez lointain, inaccessible, avec lequel il ne fait pas bon plaisanter. Les meilleurs catholiques du Midi se montrent plus familiers, dans leurs prières mêmes; ils voient plus facilement en Dieu un père à qui se confier qu'un souverain terrible qu'on n'approche pas sans tremblement. La maison de Dieu devient leur propre maison, et le cardinal de Cabrières ouvrait toutes grandes les portes de son église aux émeutiers de l'Hérault. Mais au midi comme à l'ouest et au nord, il est des limites qu'on n'a pas le droit de dépasser, des manques de respect que n'excuse pas la plus filiale familiarité.
Ces deux points posés, que faut-il penser du livre de M. H. Nadel ? Les prêtres y paraissent uniquement soucieux de bien vivre et de bien boire. C'est laisser trop de champ à l'ennemi qui pourrait le prendre au sérieux et le traiterait comme un document.M. Nadel ne tient aucun compte d'ailleurs de la misère à laquelle la séparation a réduit presque tous nos curés de campagne.
Aussi arrive-t-il à ridiculiser la religion et Dieu: qu'on en juge plutôt par son chapitre sur les religions, ou par ce qu'il dit des miracles.
Il fallait beaucoup de doigté pour écrire un tel recueil de nouvelles; il fallait, au fond du coeur, une véritable et sincère affection pour la religion et ses ministres. M. Nadel n'y mit que de l'esprit. Est-ce trop ou trop peu? Tant y a que, sans s'exagérer ses méfaits, nous ne pouvons pas dire qu'il ait réussi à écrire une oeuvre saine et recommandable."
Qui peut et doit juger ?????
Alifer61